Entretien accordé par Le Prince Jean à la "Nouvelle Revue Universelle"

Publié le par Café Bleu

“LA FRANCE A BESOIN D’UNE BOUFFÉE D’OXYGÈNE”
ENTRETIEN AVEC LE PRINCE JEAN DE FRANCE



- Monseigneur, la campagne présidentielle entre dans sa phase finale. Quels sentiments vous inspire cet affrontement rituel entre représentants des principaux partis politiques?

- Jamais campagne électorale ne m'aura paru à ce point "désincarnée”, je veux dire privée de substance, coupée des préoccupations quotidiennes des Français. On a I'impression d'une espèce de formatage préalable des candidats qui s'expriment tous de la même façon, avec les mêmes formules stéréotypées et passent sans transition d’un sujet à l'autre selon la dernière mode du jour ou les vœux supposés de l’opinion, tels que croient les discerner les instituts de sondage. Comme tout cela parait factice! Comme tous ces prétendants à la fonction suprême ont du mal à prendre de la hauteur!
Avez-vous remarqué d'ailleurs que le mot “France” semble banni du langage de nos candidats ? On ne parle que de la "République" comme s'il sagissait là d'un modèle inégalable et insurpassable de régime politique, d'une sorte de “fin de l'Histoire”. Tous ces candidats ont-ils conscience que la France n'est pas une île, que le monde est en train de bouger plus vite que nous ? Ce monde ne nous attendra pas. Du fait de notre inertie, il avance même de plus en plus souvent sans nous. A force de vivre dans l’instant, dans l’éphémère, d'avoir les yeux rivés sur l'horizon du prochain sondage, tous ces candidats ont perdu conscience des permanences de notre histoire autant que des évolutions indispensables. Le facteur temps leur échappe! Résultat paradoxal: toute cette agitation politique menée dans l'urgence et privée de principes n'aboutit qu'à une France immobile, attachée à ses vieilles lunes ...

- Cette incapacité de nos dirigeants à mener les réformes indispensables au maintien de notre pays dans le peloton de tête des grandes nations incite nombre d'observateurs à faire le constat du déclin de la France. Ce déclin vous paraît-il patent?

- Chaque fois que je considère l'état de la France, j'éprouve une tendance naturelle à passer en revue ses atouts innombrables, ses facteurs multiples d'espérance, sa formidable capacité de rebond plutôt qu'à me lamenter sur ses scléroses, ses blocages, ses retards très réels. Affaire de tempérament ou confiance inébranlable dans les inépuisables ressources morales, psychiques et matérielles de mon pays? Je me garderai de trancher. Mais je constate simplement que s'il y a déclin, c'est l'Etat contemporain lui-même qui en est le principal responsable, le vecteur essentiel. Les institutions actuelles ne garantissent plus l'impartialité et n'offrent plus la durée, l'une et l'autre indispensables à l'heureux développement d'une grande ambition nationale. Face à la pression dissolvante des groupes de pression, œuvrant à la satisfaction immédiate d'intérêts particuliers, l'Etat se perd en mille actions précipitées et contingentes dont aucune ne répond vraiment aux exigences du bien commun. L'Etat ressemble en permanence à un navire ballotté en tous sens sur une mer déchaînée. II en oublie sa vocation première qui est d'indiquer clairement un cap et de réunir les conditions permettant de s'y tenir. Dans ce pays, l'Etat prétend faire tant de choses qui ne relèvent pas de sa compétence qu'il en néglige ses missions essentielles. Son insatiable boulimie a fini par le rendre obèse et myope. Alors qu'iI juge nécessaire de régenter la vie de chacun jusque dans les occupations les plus quotidiennes, qu'iI semble prendre un malin plaisir à tourmenter ses citoyens à tout propos, il se révèle dans le même temps incapable de répondre aux questions fondamentales dont dépend notre survie même : Quelle ambition pour la France? Quelle place pour elle dans le monde de demain ? Comment entend-elle relever les immenses et périlleux défis de la mondialisation ? Sur tous ces sujets, nous ne percevons qu'un silence accablant.

- Mais alors, que faire ?

- D’abord rendre leurs libertés aux Français ! Dans tous les domaines, la tâche la plus urgente me parait être de faire sauter les multiples entraves qui emprisonnent les Français, les étouffent, les empêchent d'aller de l'avant. Sous ses différents masques libertaires, l'Etat engendré par la Révolution française n'a cessé d'étendre son emprise de plus en plus tyrannique sur ce qu'il est convenu d'appeler "la société civile “. Voyez comme nos dirigeants prétendent régler les activités du pays et jusqu'à nos existences dans leurs moindres détails: marche des entreprises, vie des familles, éducation des enfants, tout y passe! II n'est plus un seul secteur d'activités dans lequel vous puissiez prendre une initiative sans être obligé d'en référer à un moment ou l'autre à un représentant de l'Etat. Malheur à qui laisse passer la tête: tout est cadenassé politiquement, intellectuellement, juridiquement. Ce dont les Français ont le plus besoin, c'est d'une énorme bouffée d'oxygène! Il leur faut se libérer de l'Etat sous la forme qu'il a prise au cours des deux derniers siècles. C'est devenu là une nécessité d'autant plus vitale qu'à mesure même qu'il étendait son pouvoir dans tous les domaines, cet État poussait les idées des Lumières à leurs conséquences les plus extrêmes et les plus néfastes. Il n'est que de lire le dernier et admirable ouvrage dc Jean Sévillia, “Moralement correct”, pour se rendre compte à que! point nos dirigeants, qui ont établi un système de contrôle maniaque des activités sociales, encouragent dans le même temps l’effacement de toutes les règles collectives traditionnelles en matière de morale et de valeurs. II y a là comme une sorte d'enchaînement implacable: en déresponsabilisant les Français, on leur a fait perdre le sens des vraies valeurs. C'est seulement en leur permettant de se sentir à nouveau responsables qu'on leur fera retrouver le goût des valeurs fondamentales sans lesquelles il n'est pas de société juste et durable.

- Dans la société violemment laïcisée qui est la nôtre, vous ne craignez pas de vous définir comme un “prince chrétien”. Pourquoi tenez-vous tant à ce qualificatif que certains pourraient être tentés de vous reprocher ?

- Étant ce que je suis et venant d'où je viens, qui pourrait imaginer que je me définisse autrement? Je crois que c'est la seule façon de mériter l'estime de mes compatriotes quelles que soient leurs propres origines et leurs croyances. J'aime à me présenter pour ce que je suis. Libre aux caméléons politiques qui sont en perpétuelle campagne électorale de se déguiser en ce qu'ils ne sont pas dans l'espoir sordide de gagner quelques paquets de voix. Quant à moi, je préfère exprimer une double fidélité: fidélité à mes racines personnelles, familiales; fidélité aussi à cette notion de service de la France qui m'a été transmise dès mon plus jeune âge. Dans cette optique, être "prince chrétien", c'est incarner la nécessaire réconciliation de tous les Franc;ais autour de l'histoire ancienne et récente de leur pays. Toute leur histoire. Je voyage beaucoup. Je connais bien les Etats-Unis, l'Amérique latine, les pays du pourtour méditerranéen, le Proche-Orient. Prince franc;ais, je ne cesse de sentir partout où je suis reçu, combien le fait de m'y présenter aussi en prince chrétien me vaut un surcroît de respect et de considération. Cela n'est pas vrai seulement dans un pays comme la Pologne pour lequel je dois m'envoler très prochainement et où j'aurai l'occasion de m'entretenir avec les plus hauts responsables de l'Etat et de l'Eglise. C'est vrai aussi pour de nombreux pays laïcs ou musulmans dont les dirigeants me réservent souvent un accueil d'une chaleur ct d'un faste réellement touchants. Apparemment, à l'inverse de nos responsables politiques, il ne manque pas de chefs d'Etat ou de gouvernement à l'étranger pour savoir que l'histoire de France ne se résume pas à ses épisodes les plus récents et pas toujours les plus glorieux.

- Grand voyageur, vous multipliez aussi les déplacements en France?

- En plus de nombreux déplacements personnels, j'effectue plusieurs voyages par an dans les régions françaises dans le cadre de mon association Gens de France!. II s'agit pour moi de mettre en valeur diverses initiatives locales au nationales, grâce au relais des journalistes qui m’accompagnent. Je porte un intérêt particulier à la recherche, à l’éducation, à la culture qui sont les clés de notre avenir et de notre prospérité. Je suis d'ailleurs en train de mettre sur pied ma propre entreprise pour contribuer à la promotion du patrimoine français et soutenir diverses initiatives en ce domaine. Ces déplacements m'offrent aussi l'occasion de rencontres directes, confiantes et fructueuses avec mes compatriotes de tous âges et de toutes conditions qui sont extrêmement nombreux à venir me saluer et à m'encourager dans ma démarche. Ils me permettent de mieux connaître et de mieux comprendre les préoccupations et les passions des Franc;ais et de nouer avec eux un lien affectif, si important pour moi. C'est que je méfie instinctivement de tout ce qui est abstrait. D'où ce souci qui est mien “de penser global et d'agir local”, ce qui signifie tout simplement que c'est en restant fidèle à ses racines que le peuple français a les plus grandes chances de se préparer aux défis du futur. Nous devons faire fructifier notre génie propre, c'est la condition du succès. C'est pour les mêmes raisons que je me passionne pour la cause de la francophonie à laquelle je m'efforce de contribuer par divers voyages, tels ceux que j'ai effectués au Québec, en Louisiane ou encore au Liban. Autant de régions du monde qui conservent des liens historiques puissants avec la France tant notre culture a toujours su tirer vers 1e haut ceux qui en étaient imprégnés. Nulle part ailleurs qu'en ces contrées lointaines et pourtant si proches de notre cœur, je n'ai pris autant conscience des liens privilégiés qu'un prince de la Maison de France possède avec l'histoire .

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